18 / 04 / 2024

La maltodextrine, aussi dangereuse que le sucre !

S’il vous arrive de consommer des aliments issus de l’industrie agro alimentaire, c’est-à-dire des aliments ultra transformés, vous devrez toujours observer une règle fondamentale : bien lire les ingrédients qui figurent sur l’étiquette. Si les différents sucres ajoutés un peu partout (entre autres agents chimiques distillés par l’industrie agro-alimentaire) n’ont aujourd’hui plus vraiment de secret pour nous, il en est néanmoins qui ne sont pas classés comme tels, mais qui se comportent comme des sucres dans notre corps. C’est le cas de la maltodextrine, notre sujet d’aujourd’hui.

En guise d’introduction

Le rapport publié par l’Anses mi-mars1 n’a certainement pas été une grande surprise pour vous comme pour moi. Largement relayé dans la presse tant médicale que grand public, il aura eu le mérite d’ouvrir les yeux à ceux qui n’en avaient aucune connaissance, et surtout - espérons-le - de faire prendre conscience qu’outre la nécessité de bien lire les étiquettes des produits qu’on s’apprête à acheter, d’éviter (si ce n’est éliminer définitivement) tout ce qui est aliment ultra-transformé.

Je vous le résume en quelques mots avant d’entrer dans le vif du sujet. Pour dresser ce bilan complet de l’évolution de l’utilisation des ingrédients sucrants ou vecteurs de goût sucré dans les boissons et les aliments transformés, l’Anses a passé en revue les listes d’ingrédients sur 54 000 produits2 présents sur le marché entre 2008 et 2020 et répertoriés par l’Observatoire de l’alimentation (Oqali). Il s’avère que 77% de ces produits contiennent au moins un ingrédient sucrant ou vecteur de goût sucré, y compris dans les produits salés.

Le saccharose (équivalent du « sucre de table ») est retrouvé dans plus de la moitié des produits alimentaires étudiés (58%) et 59% des produits utilisent une classe ou une combinaison de classes d’ingrédients sucrants ou vecteurs de goût sucré. Vous reprendrez bien un petit shoot de sucre ?

Si l’Anses observe une diminution significative du pourcentage de produits contenant ces ingrédients (le plus souvent des produits salés) au cours des dix dernières années, cela ne veut pas dire qu’ils ont une moindre teneur en sucres. Les quantités utilisées étant rarement indiquées sur les emballages. L’Anses précise qu’elle n’a pu se pencher sur le sujet…

Les ingrédients sucrants et autres vecteurs de goût sucré s’appellent : sirop de riz brun, édulcorant de maïs, sirop de maïs ou extrait sec de sirop de maïs, jus de canne, jus de canne déshydraté, dextrose, fructose, jus de fruit concentré, glucose, sirop de maïs à haute teneur en fructose, miel, sucre inverti, lactose, sirop de malt, maltose, mannitol, sirop d’érable, mélasse, sucre brut, sirop de riz, saccharose, sorbitol, sorgho ou sirop de sorgho, sucrose, sirop, mélasse, sucre turbiné, xylose… Mais aussi maltodextrine.


Bien pire que le sucre

Si on sait à quoi s’en tenir avec tous les « oses » et autres sirops, ce n’est pas le cas avec cet ingrédient, présent dans de nombreux produits alimentaires : le pain (et tous les produits de boulangerie), les chips et frites, les mélanges d’assaisonnement (quasiment toutes les vinaigrettes), les pâtes, les soupes, les préparations pour nourrissons, les arômes, les suppléments, certains compléments alimentaires pourtant réputés bons pour la santé, des substituts de repas élaborés pour une « dite » perte de poids etc., et les boissons énergisantes et boissons pour sportifs, y compris « sans sucre » (bière light). Pourtant, comme nous alerte le Dr Eric Berg, expert en santé et bien-être, spécialisé dans le régime cétogène et le jeûne intermittent, il s’agit là d’un glucide bien plus dangereux que le sucre3.

Il n’est pas classé en tant que sucre, il n’a pas le goût sucré, mais il se comporte comme un sucre dans notre corps, et il a un indice glycémique bien plus élevé que le sucre : entre 116 et 136, contre 70 pour le sucre de table et 100 pour le glucose. Certaines études nous parlent d’index glycémique de 96, mais de toutes façons, cet index nous parle d’une glycémie très élevée ! De tous les ingrédients alimentaires ultra-transformés, le Dr Berg le considère comme le pire, pouvant mener à la graisse abdominale, au diabète, à l’inflammation intestinale, à une dysbiose, bouleversant le subtil équilibre bactérien de notre microbiote en favorisant la prolifération des mauvaises bactéries… Mais qu’est-ce donc que la maltodextrine ?

Pas une mais des maltodextrines

Il s’agit d’un ingrédient très raffiné et hautement transformé. Donc, cela commence mal.

Les maltodextrines sont produites industriellement par hydrolyse acide ou enzymatique de n’importe quel amidon de plante (maïs, riz, blé, manioc, etc.), suivie d’une purification et d’un séchage par pulvérisation (spray drying). Il en résulte de la poudre blanche utilisée (l’équivalent d’une gélule, nous explique le Dr Berg) dans une large gamme de produits alimentaires et de boissons y faisant office de substitut de graisses, agent de texture, agent de charge4, substitut de sucre…

Il faut dire qu’elles ne coûtent rien à fabriquer et engrangent des bénéfices faramineux : 2,64 billions de dollars (pour rappel, un billion vaut 1000 millions) par an, comme le souligne le Dr Berg. Alors autant en mettre partout où on peut.

En tant que dérivés de l’amidon, elles possèdent les mêmes liaisons que celles trouvées dans l’amidon et sont rapidement transformées en glucose5. Aux États-Unis, les industriels utilisent plutôt l’amidon de maïs (potentiellement OGM et traité au glyphosate !), en Europe, c’est celui du blé.

Ce qui ajoute à la complexité de la chose avec cet ingrédient, c’est qu’il existe en réalité deux formes de maltodextrines : les maltodextrines digestibles (ou simplement maltodextrines) et les maltodextrines non digestibles (également appelées résistantes à la digestion). Elles sont exploitées commercialement comme ingrédients alimentaires sous le même dénominateur, ce qui ajoute à la confusion du consommateur.

Ces deux formes ont peu de point commun sur le plan chimique et nutritionnel, et si les premières (les digestibles) sont bien définies chimiquement, comprises et documentées, les deuxièmes – étant la famille la plus récente et la plus complexe – le sont beaucoup moins… Ce qui n’empêche pas de les considérer sans danger, cherchez l’erreur.


Les maltodextrines digestibles

Les maltodextrines digestibles sont obtenues à partir du traitement chimique des amidons végétaux et sont utilisées comme additifs alimentaires, qui sont rapidement digérés, fournissant du glucose comme énergie alimentaire.

En raison de leur production rapide de glucose, les maltodextrines digestibles présentent des risques potentiels pour les personnes atteintes de diabète, mais pas que…

Elles ont des applications variées dans la transformation des aliments et des boissons, comme la nutrition médicale, l’alimentation infantile, et les produits de supplémentation sportifs. Elles sont aussi utilisées comme substitut au lactose.

Elles sont utilisées pour améliorer la texture et la sensation en bouche des aliments et produits transformés, comme les frites de pommes de terre, et dans le beurre de cacahuètes light pour réduire la teneur en graisse. C’est un agent aromatique, un agent gonflant et un substitut du sucre.


Effets sur la santé

En raison de la libération de molécules de glucose lors de la digestion, la maltodextrine digestible peut provoquer une augmentation rapide du taux de sucre dans le sang quand elle est consommée en grande quantité, en particulier chez les diabétiques ou les personnes souffrant de résistance à l’insuline. Comme elle est rapidement digérée et absorbée, une consommation excessive peut contribuer à une prise de poids, une altération de la sensibilité à l’insuline et une élévation des lipides sanguins.

On retrouve la maltodextrine digestible ailleurs que dans les produits alimentaires transformés. Elle est aussi utilisée pour enrober des pilules et des comprimés, ainsi que pour formuler des poudres, dans la fabrication de médicaments sur ordonnance et dans les compléments alimentaires.

Elle est aussi utilisée comme insecticide horticole tant aux champs que sous serres.


Les maltodextrines résistantes à la digestion

Les maltodextrines résistantes à la digestion sont définies comme des additifs alimentaires nutritionnels en raison de leur capacité, lors de la fermentation dans le côlon, à produire des acides gras à chaîne courte, qui contribuent à la santé gastrointestinale. C’est ainsi qu’elles sont présentées par leurs fabricants.

Elles résultent également du traitement chimique des amidons végétaux, mais sont traitées à l’aide de méthodes spécifiquement conçues pour résister à la digestion. Un amidon alimentaire est exposé à une combinaison de chaleur, d’acide et d’enzymes. Les méthodes font foison (jusqu’à 14) et comme le processus n’est pas standardisé, chacun y va de sa « recette »… Pour une famille qui n’est pas bien définie et complexe, c’est quand même léger !

Elles sont utilisées comme ingrédients dans de nombreux produits de consommation, tels que les édulcorants hypocaloriques.

Sur l’étiquette, les noms utilisés pour identifier la maltodextrine non digestible incluent les fibres solubles, la dextrine résistante ou la dextrine. L’amidon alimentaire utilisé pour fabriquer l’ingrédient peut aussi y figurer.

En tant que fibres alimentaires prébiotiques, elles font office d’additifs utilisés dans les aliments transformés principalement comme agents de charge, ou dans le but de conférer un effet sur la santé, dans les boissons, les produits laitiers et les desserts.

Les maltodextrines non digestibles sont aussi relativement faibles en calories, incolores, inodores et insipides.


Effets sur la santé

En tant que fibre alimentaire fermentescible, elles sont « vendues » comme ayant des propriétés qui pourraient améliorer le diabète et le syndrome métabolique.

La consommation d’aliments contenant la maltodextrine non digestible accroit la fréquence et le volume des mouvements intestinaux, soulageant potentiellement la constipation. Mais pour le versant négatif (écrit en tout petit pour qu’on ne puisse pas le lire) la consommation de nourriture ou de produits transformés contenant des fibres alimentaires fermentescibles, comme la maltodextrine non digestible, peuvent causer un inconfort abdominal, des ballonnements et des flatulences.

Pour conclure, si vous n’étiez pas encore convaincu du bien-fondé pour votre santé tant physique que mentale du retrait pur et simple de tout aliment ultra-transformé de votre assiette, vous le serez certainement maintenant. Il peut certes s’avérer parfois difficile de déroger à la règle, auquel cas il vous faudra chausser les loupes (ou pas, si vous avez de très bons yeux) et bien décrypter la liste des ingrédients figurant sur l’étiquette.

Portez vous bien !

Marion Kaplan et Myriam Marino


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Notes :

1 - Bilan de l’utilisation des sucres et édulcorants dans les aliments transformés, Anses, 19 mars 2024

2 - Glaces et sorbets, confitures, barres céréalières, jus et nectars, produits laitiers, sauces, charcuteries, etc.

3 – The carb more dangerous than sugar, Dr Eric Berg, sur son blog : https://www.drberg.com

4 - Les agents de charge sont des additifs alimentaires autres que l’eau et l’air ajoutés dans une denrée alimentaire en vue d’accroître son volume sans pour autant augmenter, de manière significative, sa valeur calorifique ou nutritionnelle. Ils servent à charger la préparation alimentaire, c’est-à-dire à lui donner du volume sans toutefois dominer la saveur des aliments. Ces composés sont également appelés agents de remplissage ou agents gonflants.

5 – Bilan de l’Anses, note 1


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